Place de l’hospitalisation sous contrainte dans la crise suicidaire. Utilisation de la loi du 27 juin 1990.

Dr Michel BENOIT

CHU de Nice

Parmi toutes les situations critiques qu’un individu peut traverser dans son existence, une crise qualifiée de suicidaire est probablement celle qui alarme le plus le sujet lui-même, son entourage ou la société dans son ensemble. Le recours fréquent à l’hôpital dans ce cadre stigmatise la notion de gravité attribuée au risque suicidaire, et a fortiori à la tentative de suicide réalisée.

Plusieurs fonctions peuvent être attribuées à l’hospitalisation : solution de sécurité pour protéger le sujet contre un geste suicidaire, soins et prise en charge après une tentative de suicide, évaluation précise du risque et de la sémiologie psychiatrique, préparation d’un projet élaboré de soins, offre d’un lieu neutre dans une situation conflictuelle. Ces rôles sont discutés dans d’autres chapitres sur les modalités d’intervention.

Nous aborderons plus particulièrement le recours à l’hospitalisation sous contrainte dans les aspects cliniques, réglementaires et évolutifs de la loi du 27 juin 1990, qui a redéfini les conditions réglementaires de ces hospitalisations.

Aspects cliniques du recours à l’hospitalisation sous contrainte

Quelles qu’en soient les raisons et les motivations, les soins et les examens que tout patient nécessite ne peuvent pas s’effectuer sans son consentement, dans le respect de la liberté que tout sujet a de gérer sa vie et de prendre en charge sa santé comme il l’entend. Lorsqu’une hospitalisation est nécessaire, elle doit se faire sur le mode de l’hospitalisation libre, que ce soit en psychiatrie ou dans n’importe quel autre service hospitalier (Articles L. 3211-1 et 2 du Code de Santé Publique).

Les seules exceptions à cette règle sont les cas où les trois conditions suivantes sont réunies :

C’est généralement à cause de cette dernière condition que l’hospitalisation libre n’est pas possible.

En cas de crise suicidaire, diverses situations peuvent nécessiter une hospitalisation (ANAES 1998 ; Hillard et col 1988):

C’est la dangerosité du sujet liée au risque de passage à l’acte sur lui-même ou plus rarement sur autrui qui est d’abord appréciée pour juger de la nécessité ou non de l’hospitalisation, libre ou sous contrainte. Ce critère est très réducteur, sachant que l’hôpital est surtout utilisé comme cadre d’évaluation par une équipe multidisciplinaire, comme lieu d’initiation de soins des pathologies associées, parfois comme refuge ou solution temporaire de mise à l’écart du patient de son environnement habituel. L’absence de critères très fiables pour apprécier le risque de passage à l’acte doit faire prendre également en compte des éléments qui ne sont pas directement liés à la dangerosité, mais qui font perdre des chances de guérison au patient et par conséquent augmentent le risque suicidaire. Un exemple fréquent est celui du tableau de dépression mélancolique chez un individu ayant un environnement non étayant, et qui peut motiver une HDT même en l’absence d’idées suicidaires, parce que ce tableau clinique peut être à tout moment le point de départ d’une grave crise suicidaire.

L’HDT ou l’HO sont des mesures d’assistance, dont le patient doit être informé sans délai. Le contexte volontiers dramatisé de l’arrivée à l’hôpital, l’opposition ou l’agressivité du patient (et parfois de sa famille), les convictions personnelles des soignants par rapport à la problématique du suicide sont autant de facteurs qui peuvent déformer le sens de ces mesures. Beaucoup de patients qui font l’objet d’une HDT ou d’une HO peuvent le ressentir comme une injustice, une punition ou une entrave intolérable à leur liberté. Ces réactions sont assez compréhensibles lorsqu’elles viennent de sujets qui, par définition, n’ont pas conscience de la nécessité des soins qu’on leur impose. L’implication d’un membre de la famille comme tiers dans l’HDT est fréquemment vécue par le patient comme une attitude de domination, une agression, et ce sentiment s’alimente souvent du contexte familial et de son rôle dans la crise. Quel que soit le contexte, et notamment en urgence, il convient d’expliquer systématiquement au patient les raisons de cette démarche de soins et notre impossibilité d’y déroger, les conditions de la prise en charge (lieu d’hospitalisation, délai, équipe), l’aspect transitoire de cette hospitalisation, en d’autres termes il faut travailler une alliance thérapeutique même lorsqu’elle paraît rompue.

Aspects réglementaires de l’hospitalisation sous contrainte

Ces mesures concernent en priorité des sujets adultes. Pour les sujets mineurs, notamment adolescents, c’est l’autorité parentale qui s’exerce, hormis en cas d’hospitalisation d’office ou décidée par l’autorité judiciaire (ordonnance de placement provisoire).

La loi du 27 juin 1990 est une refonte de la loi du 30 juin 1838, l’accent étant mis sur les droits et la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux (cf. loi en Annexe). Elle prévoit les trois modes d’hospitalisation en psychiatrie : hospitalisation libre, à la demande d’un tiers, et d’office.

Hospitalisation libre

Ce mode d’hospitalisation est le règle, en psychiatrie comme dans les autres spécialités médicales. Le patient garde le choix de son lieu d’hospitalisation, dans les limites de l’habilitation de l’établissement et des possibilités d’accueil.

Dans ce cas, le patient consent aux soins hospitaliers qui sont justifiés, et est jugé apte à y consentir par le médecin qui pose l’indication. Cela sous-tend qu’un examen médical direct est toujours nécessaire pour porter l’indication ou la non-indication de l’hospitalisation. Ensuite, cet examen médical va conclure si l’état mental du sujet lui permet de consentir aux soins. Ainsi, un sujet suicidaire au comportement particulièrement instable peut consentir dans un premier temps à l’hospitalisation puis, en raison de ses troubles, se rétracter dès son arrivée à l’hôpital et sortir. L’examen réalisé aux urgences de l’hôpital sert notamment à apprécier ce risque, par une observation comportementale et psychique attentive, à la lecture des antécédents et du contexte actuel.

Hospitalisation à la demande d’un tiers (HDT)

  • Conditions
  • Lorsque l’hospitalisation est nécessaire en raison des troubles mentaux du sujet, et que son consentement n’est pas recevable — ou fiable - à cause de ses troubles, une HDT doit être mise en place.

    La notion de troubles mentaux ne signifie pas forcément que le sujet est atteint d’une pathologie psychiatrique avérée qu’il faut connaître au moment de l’admission. Une situation de risque suicidaire, ou une tentative de suicide, n’est pas synonyme de trouble psychiatrique, mais c’est une situation qui fait suspecter un trouble mental. L’hospitalisation pourra être justifiée par la nécessité de parfaire la recherche d’une pathologie sous-jacente et de chercher à réduire le risque de passage à l’acte à court terme.

    L’examen a jugé que les troubles, présents ou suspectés, nécessitent une hospitalisation immédiate et une surveillance constante.

  • Pièces nécessaires
  • Une HDT requiert un ou deux certificats médicaux et une demande libre d’un tiers.

    Dans la procédure normale, il faut deux certificats médicaux, dont un signé par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement d’accueil (dans ce texte, on entendra par établissement d’accueil l’hôpital où est situé le service psychiatrique qui va accueillir le patient). Cela signifie que le premier certificat peut être rédigé par un médecin extérieur à l’hôpital, ou par un médecin d’un autre hôpital que celui qui va prendre en charge le patient (ex : médecin du service des urgences, en l’absence de lien juridique entre ce service et l’établissement d’accueil).

    Tout médecin habilité à exercer la médecine, au sens du Code de Santé Publique, spécialiste ou non, peut rédiger ces certificats (médecin thésé ou en situation de remplaçement). Ces médecins ne doivent pas être parents ou alliés avec le patient, le tiers, le directeur de l’établissement d’accueil, ni entre eux. Chacun de ces certificats est rédigé en toute indépendance, après un examen médical effectif (cf. modèle en encadré). Il doit être circonstancié, c’est à dire mentionner les éléments de l’état comportemental et mental de la personne qui ont amené à la décision de l’hospitalisation, en évitant des termes médicaux ou scientifiques. Il doit mentionner que ces troubles nécessitent des soins urgents assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier et ne permettent pas au patient de donner son consentement à cette hospitalisation. Il conclut par la nécessité d’hospitaliser le patient à la demande d’un tiers, conformément à la loi du 27 juin 1990. Il n’est pas indispensable de mentionner les articles du code de Santé Publique (cf Fiche d’Information du 13 mai 1991), lesquels viennent d’être modifiés (Ordonnance N° 2000-548 du 15 juin 2000).

    Il est à noter que dès lors que le premier certificat et la demande du tiers sont rédigés, l’HDT est considérée comme initiée et le patient peut être maintenu à l’hôpital pour quelques heures, en attendant que le deuxième certificat soit établi.

    A titre exceptionnel et en cas de péril imminent pour la santé du patient, l’admission en HDT peut être prononcée au vu d’un seul certificat, rédigé comme indiqué plus haut, mais précisant en plus la notion de péril imminent pour la santé du sujet (HDT dite " d’urgence "). Ce certificat unique peut être rédigé par tout médecin, même exerçant dans l’établissement d’accueil.

    La durée de validité de ces certificats est de quinze jours.

    Pour toute HDT (" normale " ou " d’urgence "), il est nécessaire qu’un tiers, c’est à dire toute personne majeure portant de l’intérêt au patient, rédige une demande d’hospitalisation manuscrite sur papier libre (cf. modèle en encadré). Ce tiers n’est pas nécessairement un parent du patient. La demande, qui peut être recueillie par le directeur de l’hôpital ou son représentant délégué si la personne ne sait pas écrire, doit préciser les nom, prénoms, âge, domicile tant de la personne qui demande l’hospitalisation que du patient, ainsi que la nature des relations ou du lien de parenté qui existent entre eux. L’identité du demandeur doit pouvoir être vérifiée à l’admission (il est utile de faire une photocopie de la carte d’identité du tiers, avec son accord). Ce tiers ne peut pas exercer dans l’établissement d’accueil, mais peut exercer dans un autre hôpital, par exemple celui des urgences s’il n’est pas lié au premier. Une assistante sociale de l’établissement peut signer la demande si elle le souhaite, après avoir rencontré le patient, considérant qu’elle ne fait pas partie du personnel soignant au sens juridique.

    Une notion essentielle est que nul ne peut être contraint à signer une demande d’HDT. Il arrive souvent en situation d’urgence qu’un parent ou une personne proche d’un patient suicidaire ne veut pas signer cette demande, pour des raisons qui peuvent être très diverses. Le plus souvent, c’est à cause d’un sentiment de culpabilité lié à l’idée de la contrainte infligée au patient, voire de peur de reproches ultérieurs venant du patient. Si le tiers ne change pas son attitude après les explications fournies sur la mesure et ses aspects d’assistance au patient, il convient alors de rechercher un autre signataire, si le premier tiers ne s’y oppose pas. Le cas plus délicat est celui où un parent proche est hostile à l’hospitalisation du sujet, pourtant nécessaire sous contrainte en raison des troubles constatés. Si le parent sollicité persiste dans sa position après les tentatives d’explication du risque, il serait inutile de proposer à un parent plus éloigné de signer la demande, car le premier pourrait demander la levée immédiate de l’HDT ainsi prononcée (voir chapitre sur le suivi). Dans ce cas, on peut parfois recourir à l’hospitalisation d’office, dans le cas où les troubles mentaux du patient peuvent mettent en péril la sûreté des personnes, et notamment la sienne (Albernhe et Tyrode, 1993).

    Le transport du patient de son lieu de résidence à l’hôpital doit être organisé par l’entourage du patient (véhicule personnel, ambulance privée). En pratique, les pompiers participent volontiers à ce type de transport lorsqu’une HDT est initiée, mais ils n’ont pas obligation de le faire.

  • Suivi de l’HDT
  • La loi demande des certificats médicaux de confirmation ou de levée de l’HDT, éventuellement prévoyant des sorties d’essai. Ces certificats doivent être établis après l’admission par des psychiatres de l’établissement d’accueil au bout de 24 heures, de 15 jours, puis tous les mois. L’HDT peut être levée :

  • au vu d’un certificat médical de levée
  • à la demande d’un proche du patient (dans l’ordre hiérarchique, le curateur, le conjoint ou concubin déclaré, les ascendants, les descendants majeurs, le tiers signataire sauf opposition d’un parent, toute personne autorisée par le conseil de famille,
  • par le président du TGI (tribunal de grande instance) qui peut être saisi par le patient, par le procureur de la République, ou saisi d’office.
  • par la commission départementale des hospitalisations psychiatriques (CHDP).
  • Il faut souligner que le patient conserve tout au long de son hospitalisation des droits et libertés individuelles applicables à tout patient (Circulaire DGS/SP3 n°48 du 19 juillet 1993). Il a la possibilité de choisir, représenté par le tiers demandeur, l’équipe de soins sous réserve de son habilitation à recevoir des HDT et de la disponibilité d’accueil. Il doit recevoir tout éclaircissement sur sa situation de soins, a la possibilité d’émettre des courriers sans délai, de communiquer avec les autorités, conserve ses libertés fondamentales hormis la possibilité de quitter le service hospitalier sans avis médical. Des restrictions des visites et des communications téléphoniques sont possibles si elles sont argumentées par l’état de santé du malade.

    Hospitalisation d’office (HO)

  • Rappel des procédures
  • Ce mode s’applique aux patients dont les troubles mentaux compromettent la sûreté des personnes et/ou troublent l’ordre public. Cette hospitalisation nécessite au préalable un certificat médical circonstancié (cf. encadré) comparable à celui de l’HDT, établi par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement d’accueil (sauf en cas de transformation d’une HDT en HO). Au vu de ce certificat, le préfet de département (préfet de police à Paris) peut prononcer un arrêté d’hospitalisation d’office. Ce document peut préciser la nécessité d’une aide de la force publique (police, gendarmerie) pour accompagner le patient sur le service hospitalier.

    En cas de danger imminent pour autrui, le maire de la commune (ou le commissaire de police à Paris), s’appuyant sur un avis médical simple ou sur la notoriété publique, peut prononcer un arrêté provisoire d’HO qui n’est valable que 48 heures. Il en informe le préfet dans les 24 heures, lequel prononcera s’il y a lieu un arrêté d’HO.

    Le lieu d’hospitalisation, qui ne peut pas être choisi par le patient, est fixé dans l’arrêté.

    Divers certificats de suivi sont nécessaires pour confirmer ou pour demander la levée de l’HO : ils doivent être établis par un psychiatre de l’établissement d’accueil au bout de 24 heures, de 15 jours, d’un mois puis tous les mois. La levée de l’HO est prononcée par le préfet, généralement au vu d’un certificat médical la proposant.

  • Application aux situations de crise suicidaire
  • Les modalités de l’HO rendent bien compte que ce mode d’hospitalisation s’applique rarement aux crises suicidaires, pour lesquelles l’HDT est la solution de contrainte la plus adaptée.

    Une situation dans laquelle l’HO est théoriquement indiquée est celle où le patient menace de se suicider, mais également de porter atteinte à ses proches de façon patente. Le risque pour la sûreté des personnes est alors constaté. Néanmoins, il est fréquent que des patients traversant une crise suicidaire manifestent des mouvements d’agressivité qui sont avant tout dirigés vers eux-mêmes. En pratique, il est important de bien peser la dangerosité pour autrui avant de porter l’indication d’HO, mesure plus lourde de sens et généralement plus prolongée dans le temps qu’une HDT.

    Un autre cas particulier concerne les sujets détenus en maison d’arrêt présentant une crise suicidaire qui nécessite des soins psychiatriques en milieu hospitalier. Hormis les cas où un service hospitalier pour détenus existe et peut accueillir le patient, il faut alors recourir à l’HO selon la procédure habituelle, c’est à dire par un certificat médical rajoutant aux mentions propres à l’HO, " conformément à l’article D398 du Code de Procédure Pénale ". Ce certificat sera transmis au Préfet qui prononcera un arrêté d’HO, permettant le transfert du patient en milieu psychiatrique.

    Modèle de certificat médical d’Hospitalisation à la demande d’un tiers.

    Je soussigné, Docteur D., certifie avoir examiné le (date de l’examen) M. ou Mme X (Nom — Prénom), né(e) le (date de naissance).

    Cette personne présente …( décrire l’état mental du patient et les particularités de sa maladie, en termes non médicaux).

    M. ou Mme X présente des troubles mentaux qui ne lui permettent pas de consentir à l’hospitalisation et son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier. En conséquence, il (ou elle) doit être hospitalisé à la demande d’un tiers dans un établissement habilité, conformément à la loi du 27 juin 1990.**

    Fait à …. Le …………..

    ** En cas de procédure d’urgence, on mentionnera " En conséquence, et en raison du péril imminent pour sa santé, il (ou elle) doit être hospitalisé à la demande d’un tiers en urgence dans un établissement habilité, conformément à la loi du 27 juin 1990 "

    Modèle de certificat médical d’Hospitalisation d’office

    Je soussigné, Docteur D., certifie avoir examiné le (date de l’examen) M. ou Mme X (Nom — Prénom), né(e) le (date de naissance).

    Cette personne présente …( décrire l’état mental du patient et les particularités de sa maladie, en termes non médicaux).

    M. ou Mme X présente des troubles mentaux dont les manifestations compromettent l’ordre public et/ou portent atteinte à la sûreté des personnes. En conséquence, il (ou elle) doit être hospitalisé d’office dans un établissement habilité, conformément à la loi du 27 juin 1990.

    Fait à …….…. le …………..

    Modèle de demande d’HDT (tiers)

    Je, soussigné(e) ………(Nom — Prénom — Profession)

    Né(e) le …………

    Domicilié(e) ……………(Adresse complète)

    Degré de parenté ou qualité par rapport à la personne ci-dessous désignée : ……….

    Prie Monsieur le Directeur du Centre Hospitalier de ……… d’admettre dans son établissement en hospitalisation à la demande d’un tiers, conformément à la loi du 27 juin 1990 la personne ci-après :

    M, Mme, Melle ………..(Nom - Prénom)

    Né(e) le ………..

    Domicilié(e) à : ………..(Adresse complète)

    Profession : …………

     

    Fait à …………. le ……………..

     

    (Signature du demandeur)

    Aspects statistiques et évolutifs de l’hospitalisation sous contrainte

    Etat actuel

    On ne dispose pas de statistique officielle sur le nombre de patients présentant une crise suicidaire et ayant eu besoin d’une hospitalisation sous contrainte. Quelques publications sur la prise en charge des tentatives de suicide rapportent des taux très variables d’hospitalisations de suite en psychiatrie (Chastang et col, 1997 ; Cremniter 1997 ; De Clercq 1992, 1994 ; Meppen et col 1993, Staikowsky et col 1997). Cette variabilité paraît explicable par l’hétérogénéité des solutions de prise en charge et des approches théoriques des équipes. Presque tous les travaux portent sur la prise en charge après une TS réalisée. Après le passage aux urgences, entre 10 et 25 % environ des suicidants sont hospitalisés en psychiatrie. Cette proportion est probablement sous-estimée, sachant que beaucoup de patient sont hospitalisés d’abord en médecine, chirurgie ou réanimation et qu’on ne connaît pas bien leur devenir après cette période. Le taux d’hospitalisation des TS violentes ou graves sur le plan somatique peut atteindre 60% d’après Cremniter (1994).

    L’importance du recours à l’hospitalisation sous contrainte est mal connue, en l’absence d’enquêtes l’ayant évaluée précisément. Des proportions très faibles d’HDT ont été rapportées peu après la promulgation de la loi de 1990, de l’ordre de 1 % des suicidants admis aux urgences (Meppen 1993). Divers indicateurs montrent que le recours à l’hospitalisation sous contrainte, après une longue période de réduction, s’est un peu accru depuis quelques années. Ainsi, le nombre d’HDT et d’HO, tous motifs confondus, a augmenté de 57% entre 1988 et 1997, dans une proportion plus importante que l’ensemble des hospitalisations en psychiatrie qui ont progressé de 31% sur la même période (DGS 1999). On constate dans le même rapport de la DGS une croissance actuelle des demandes pour des situations de crise plus que pour des troubles psychiatriques patents. Pour une majorité de départements, les HDT sont réalisées " en urgence " dans 30% des cas. La difficulté d’obtenir le deuxième certificat et de cerner précisément la notion de péril imminent sont des notions souvent avancées pour expliquer ce phénomène, en particulier dans un contexte d’urgence et de manque de temps pour évaluer la situation.

    Perspectives de modification des régimes d’hospitalisation sous contrainte

    Un premier bilan approfondi de l’application de la loi du 27 juin 1990 a été réalisé par un groupe national d’évaluation (1997) qui a mis en évidence des faiblesses et a fait des propositions de correction. Les principales innovations suggérées, applicables à des situations de crise suicidaire, sont les suivantes :

    Un large débat sur l’évolution des pratiques d’hospitalisation sous contrainte est en cours, visant notamment à garantir d’avantage les libertés individuelles et les droits des malades. Le Conseil de l’Europe a publié en mars 2000 un " Livre blanc " sur ce thème, en préparation de Recommandations européennes qui pourraient être adoptées courant 2001. Il est probable que ces recommandations viseront une nouvelle évolution des pratiques permettant une prise en charge à la fois plus efficace et plus souple des situations de crise en psychiatrie.

    Textes réglementaires

  • Loi N° 90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d’hospitalisation.
  • Comité des ministres du Conseil de l’Europe. Livre blanc sur la protection des droits de l’homme et de la dignité des personnes atteintes de troubles mentaux, en particulier de celles placées comme patients involontaires dans un établissement psychiatrique. Mars 2000.
  • Direction générale de la Santé. Circulaire DGS/SP 3 n°99-300 du 25 mai 1999 relative au rapport d’activité de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques pour l’année 1998. Transmission du bilan des d’acivité pour l’année 1997.
  • Direction générale de la Santé. Circulaire DGS/SP3 n°48 du 19 juillet 1993 portant sur le rappel des principes relatifs à l’accueil et aux modalités de séjours des malades hospitalisés pour troubles mentaux.
  • Direction générale de la Santé. Fiches d’information du 13 mai 1991 relatives à l’application de la loi du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d’hospitalisation.
  • Ministère de l’Emploi et de la Solidarité. Ordonnance n° 2000-548 du 15 juin 2000 relative à la partie Législative du code de la santé publique.
  • Références bibliographiques

  • Albernhe T, Tyrode Y. Législation en Santé mentale. Pratique médico-hospitalière. Lyon, Sedip médical, 1993.
  • Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé. Recommandations professionnelles de prise en charge hospitalière des tentatives de suicide de l’adolescent. Paris, ANAES, 1998.
  • Chastang F, Rioux P, Dupont I, Kovess V, Zarifian E. Enquête prospective sur les tentatives de suicide. Encéphale 1997 ; 23 : 100-104.
  • Cremniter D. Les conduites suicidaires et leur devenir. Rapport du Congrès de Psychiatrie et de Neurologie de Langue Française. Paris, Masson, 1997.
  • Cremniter D, Raynal JB. L’intentionnalité suicidaire à partir d’un échantillon de tentatives de suicide ayant recours à des méthodes violentes. Psychologie Médicale 1994, 26(Sp 11) : 1174-1176.
  • De Clercq M. Urgences psychiatriques et interventions de crise. Bruxelles, De Boeck & Larcier ed, 1997.
  • De Clercq M. Les tentatives de suicide, tentative de sauver le couple ou la famille ? Psychologie Médicale 1994, 26(Sp 11) : 1181-1185.
  • De Clercq M, Burquel C, Hoyois P. L’abord clinique des tentatives de suicide : comment vaincre le danger de la parole ? Psychologie Médicale 1992, 24(2) : 169-173.
  • Hillard JR, Slomowitz M, Deddens J. Determinants of emergency psychiatric admission for adolescents and adults. Am J Psychiatry 1988;145:1416-9.
  • Meppen S, Zunino FM, Mercier C, Baldo E, Kiegel P. Le CAP psychiatrique au sein du service des urgences de Centre Hospitalier Général d’Aix en Provence fonctionne-t-il comme un relais ou un lieu de soins pour les patients suicidants ? Psychologie Médicale 1993, 25(4) :300-302.
  • Staikowsky F, Descrimes N. Les tentatives de suicide (TS) dans les services d’urgence en France. Communication aux 12° Journées de la Société Française des Urgences Médicales, Nice, 1997.
  • Strohl H, Clemente M. Groupe national d’évaluation de la loi du 27 juin 1990 : présentation des travaux et des premières conclusions. IGAS, Janvier 1997.
  • ANNEXE : Loi N° 90-527 du 27 juin 1990 (Code de Santé Publique juin 2000)

    LIVRE II DU CODE DE LA SANTE PUBLIQUE LUTTE CONTRE LES MALADIES MENTALES

    TITRE Ier

    MODALITES D'HOSPITALISATION

    Chapitre Ier

    Droits des personnes hospitalisées

    Art. L. 3211-1. - Une personne ne peut sans son consentement ou, le cas échéant, sans celui de son représentant légal, être hospitalisée ou maintenue en hospitalisation dans un établissement accueillant des malades atteints de troubles mentaux, hormis les cas prévus par la loi et notamment par les chapitres II et III du présent titre.

    Toute personne hospitalisée ou sa famille dispose du droit de s'adresser au praticien ou à l'équipe de santé mentale, publique ou privée, de son choix tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du secteur psychiatrique correspondant à son lieu de résidence.

    Art. L. 3211-2. - Une personne hospitalisée avec son consentement pour des troubles mentaux est dite en hospitalisation libre. Elle dispose des mêmes droits liés à l'exercice des libertés individuelles que ceux qui sont reconnus aux malades hospitalisés pour une autre cause.

    Art. L. 3211-3. - Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux est hospitalisée sans son consentement en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être limitées à celles nécessitées par son état de santé et la mise en oeuvre de son traitement. En toutes circonstances, la dignité de la personne hospitalisée doit être respectée et sa réinsertion recherchée.

    Elle doit être informée dès l'admission et par la suite, à sa demande, de sa situation juridique et de ses droits.

    En tout état de cause, elle dispose du droit :

    1° De communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4 ;

    2° De saisir la commission prévue à l'article L. 3222-5 ;

    3° De prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix ;

    4° D'émettre ou de recevoir des courriers ;

    5° De consulter le règlement intérieur de l'établissement tel que défini à l'article L. 3222-3 et de recevoir les explications qui s'y rapportent ;

    6° D'exercer son droit de vote ;

    7° De se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix.

    Ces droits, à l'exception de ceux mentionnés aux 4° , 6° et 7°, peuvent être exercés à leur demande par les parents ou les personnes susceptibles d'agir dans l'intérêt du malade.

    Art. L. 3211-4. - Un protocole thérapeutique pratiqué en psychiatrie ne peut être mis en oeuvre que dans le strict respect des règles déontologiques et éthiques en vigueur.

    Art. L. 3211-5. - A sa sortie de l'établissement, une personne hospitalisée en raison de troubles mentaux conserve la totalité de ses droits et devoirs de citoyen, sous réserve des dispositions des articles 492 et 508 du code civil, sans que ses antécédents psychiatriques puissent lui être opposés.

    Art. L. 3211-6. - Le médecin qui constate que la personne à laquelle il donne ses soins a besoin, pour l'une des causes prévues à l'article 490 du code civil, d'être protégée dans les actes de la vie civile peut en faire la déclaration au procureur de la République du lieu de traitement. Cette déclaration a pour effet de placer le malade sous sauvegarde de justice si elle est accompagnée de l'avis conforme d'un psychiatre.

    Lorsqu'une personne est soignée dans l'un des établissements mentionnés aux articles L. 3222-1 et L. 3222-2, le médecin est tenu, s'il constate que cette personne se trouve dans la situation prévue à l'alinéa précédent, d'en faire la déclaration au procureur de la République du lieu de traitement. Cette déclaration a pour effet de placer le malade sous sauvegarde de justice. Le représentant de l'Etat dans le département doit être informé par le procureur de la mise sous sauvegarde.

    Art. L. 3211-7. - La personne hospitalisée sans son consentement dans un établissement de soins conserve le domicile qui était le sien avant l'hospitalisation aussi longtemps que ce domicile reste à sa disposition. Néanmoins, les significations qui y auront été faites pourront, suivant les circonstances, être annulées par les tribunaux.

    Si une tutelle a été constituée, les significations sont faites au tuteur ; s'il y a curatelle, elles doivent être faites à la fois à la personne protégée et à son curateur.

    Les fonctions de juge des tutelles peuvent être exercées par un juge appartenant au tribunal d'instance dans le ressort duquel la personne sous tutelle ou curatelle est hospitalisée, alors même que celle-ci a conservé son domicile dans un ressort différent de celui du lieu de traitement.

    Art. L. 3211-8. - Il peut être constitué, suivant les cas, et conformément aux articles 492 et 508 du code civil, une tutelle ou une curatelle pour la personne hospitalisée sans son consentement dans un des établissements mentionnés au chapitre II du titre II du présent livre.

    Art. L. 3211-9. - Sur la demande de l'intéressé, de son conjoint, de l'un de ses parents ou d'une personne agissant dans l'intérêt du malade, ou à l'initiative du procureur de la République du lieu du traitement, le tribunal peut nommer en chambre du conseil, par jugement exécutoire malgré appel, un curateur à la personne du malade n'ayant pas fait l'objet d'une mesure de protection et hospitalisé sans son consentement dans un des établissements mentionnés à l'article L. 3222-1.

    Ce curateur veille :

    1° A ce que les revenus disponibles du malade soient employés à adoucir son sort, à accélérer sa guérison et à favoriser sa réinsertion ;

    2° A ce que ce malade soit rendu au libre exercice de la totalité de ses droits aussitôt que son état le permettra.

    Hormis le conjoint, ce curateur ne peut pas être choisi parmi les héritiers présomptifs de la personne hospitalisée.

    Art. L. 3211-10. - Hormis les cas prévus au chapitre III du présent titre, l'hospitalisation ou la sortie d'un mineur sont demandées, selon les situations, par les personnes titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, par le conseil de famille ou, en l'absence du conseil de famille, par le tuteur avec l'autorisation du juge des tutelles qui se prononce sans délai. En cas de désaccord entre les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, le juge aux affaires familiales statue.

    Art. L. 3211-11. - Afin de favoriser leur guérison, leur réadaptation ou leur réinsertion sociale, les personnes qui ont fait l'objet d'une hospitalisation sur demande d'un tiers ou d'une hospitalisation d'office peuvent bénéficier d'aménagements de leurs conditions de traitement sous forme de sorties d'essai, éventuellement au sein d'équipements et services ne comportant pas d'hospitalisation à temps complet mentionnés à l'article L. 6121-2.

    La sortie d'essai comporte une surveillance médicale. Sa durée ne peut dépasser trois mois ; elle est renouvelable. Le suivi de la sortie d'essai est assuré par le secteur psychiatrique compétent.

    La sortie d'essai, son renouvellement éventuel ou sa cessation sont décidés :

    1o Dans le cas d'une hospitalisation sur demande d'un tiers, par un psychiatre de l'établissement d'accueil ; le bulletin de sortie d'essai est mentionné par le directeur de l'établissement et transmis sans délai au représentant de l'Etat dans le département ; le tiers ayant fait la demande d'hospitalisation est informé ;

    2o Dans le cas d'une hospitalisation d'office, par le représentant de l'Etat dans le département, sur proposition écrite et motivée d'un psychiatre de l'établissement d'accueil.

    Art. L. 3211-12. - Une personne hospitalisée sans son consentement ou retenue dans quelque établissement que ce soit, public ou privé, qui accueille des malades soignés pour troubles mentaux, son tuteur si elle est mineure, son tuteur ou curateur si, majeure, elle a été mise sous tutelle ou en curatelle, son conjoint, son concubin, un parent ou une personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade et éventuellement le curateur à la personne peuvent, à quelque époque que ce soit, se pourvoir par simple requête devant le président du tribunal de grande instance du lieu de la situation de l'établissement qui, statuant en la forme des référés après débat contradictoire et après les vérifications nécessaires, ordonne, s'il y a lieu, la sortie immédiate.

    Une personne qui a demandé l'hospitalisation ou le procureur de la République, d'office, peut se pourvoir aux mêmes fins.

    Le président du tribunal de grande instance peut également se saisir d'office, à tout moment, pour ordonner qu'il soit mis fin à l'hospitalisation sans consentement. A cette fin, toute personne intéressée peut porter à sa connaissance les informations qu'elle estime utiles sur la situation d'un malade hospitalisé.

    Art. L. 3211-13. - Les modalités d'application du présent chapitre sont déterminées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat.

    Chapitre II

    Hospitalisation sur demande d'un tiers

    Art. L. 3212-1. - Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être hospitalisée sans son consentement sur demande d'un tiers que si :

    1° Ses troubles rendent impossible son consentement ;

    2° Son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier.

    La demande d'admission est présentée soit par un membre de la famille du malade, soit par une personne susceptible d'agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants dès lors qu'ils exercent dans l'établissement d'accueil.

    Cette demande doit être manuscrite et signée par la personne qui la formule. Si cette dernière ne sait pas écrire, la demande est reçue par le maire, le commissaire de police ou le directeur de l'établissement qui en donne acte. Elle comporte les nom, prénoms, profession, âge et domicile tant de la personne qui demande l'hospitalisation que de celle dont l'hospitalisation est demandée et l'indication de la nature des relations qui existent entre elles ainsi que, s'il y a lieu, de leur degré de parenté.

    La demande d'admission est accompagnée de deux certificats médicaux datant de moins de quinze jours et circonstanciés, attestant que les conditions prévues par les deuxième et troisième alinéas sont remplies.

    Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement accueillant le malade ; il constate l'état mental de la personne à soigner, indique les particularités de sa maladie et la nécessité de la faire hospitaliser sans son consentement. Il doit être confirmé par un certificat d'un deuxième médecin qui peut exercer dans l'établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni des directeurs des établissements mentionnés à l'article L. 3222-1, ni de la personne ayant demandé l'hospitalisation ou de la personne hospitalisée.

    Art. L. 3212-2. - Avant d'admettre une personne en hospitalisation sur demande d'un tiers, le directeur de l'établissement vérifie que la demande a été établie conformément aux dispositions de l'article L. 3212-1 ou de l'article L. 3212-3 et s'assure de l'identité de la personne pour laquelle l'hospitalisation est demandée et de celle de la personne qui demande l'hospitalisation. Si la demande d'admission d'un majeur protégé est formulée par son tuteur ou curateur, celui-ci doit fournir à l'appui de sa demande un extrait du jugement de mise sous tutelle ou curatelle.

    Il est fait mention de toutes les pièces produites dans le bulletin d'entrée.

    Art. L. 3212-3. - A titre exceptionnel et en cas de péril imminent pour la santé du malade dûment constaté par le médecin, le directeur de l'établissement peut prononcer l'admission au vu d'un seul certificat médical émanant éventuellement d'un médecin exerçant dans l'établissement d'accueil.

    Art. L. 3212-4. - Dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, il est établi par un psychiatre de l'établissement d'accueil, qui ne peut en aucun cas être un des médecins mentionnés au dernier alinéa de l'article L. 3212-1, un nouveau certificat médical constatant l'état mental de la personne et confirmant ou infirmant la nécessité de maintenir l'hospitalisation sur demande d'un tiers.

    Dès réception du certificat médical, le directeur de l'établissement adresse ce certificat ainsi que le bulletin et la copie des certificats médicaux d'entrée au représentant de l'Etat dans le département et à la commission mentionnée à l'article L. 3222-5.

    Art. L. 3212-5. - Dans les trois jours de l'hospitalisation, le représentant de l'Etat dans le département notifie les nom, prénoms, profession et domicile, tant de la personne hospitalisée que de celle qui a demandé l'hospitalisation :

    1° Au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel se trouve le domicile de la personne hospitalisée ;

    2° Au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé l'établissement.

    Art. L. 3212-6. - Si l'hospitalisation est faite dans un établissement privé n'assurant pas le service public hospitalier, le représentant de l'Etat dans le département, dans les trois jours de la réception du bulletin, charge deux psychiatres de visiter la personne désignée dans ce bulletin, à l'effet de constater son état et d'en faire rapport sur-le-champ. Il peut leur adjoindre telle autre personne qu'il désigne.

    Art. L. 3212-7. - Dans les trois jours précédant l'expiration des quinze premiers jours de l'hospitalisation, le malade est examiné par un psychiatre de l'établissement d'accueil.

    Ce dernier établit un certificat médical circonstancié précisant notamment la nature et l'évolution des troubles et indiquant clairement si les conditions de l'hospitalisation sont ou non toujours réunies. Au vu de ce certificat, l'hospitalisation peut être maintenue pour une durée maximale d'un mois.

    Au-delà de cette durée, l'hospitalisation peut être maintenue pour des périodes maximales d'un mois, renouvelables selon les mêmes modalités.

    Le certificat médical est adressé aux autorités mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 3212-8 ainsi qu'à la commission mentionnée à l'article L. 3222-5 et selon les modalités prévues à ce même alinéa.

    Faute de production du certificat susvisé, la levée de l'hospitalisation est acquise.

    Art. L. 3212-8. - Sans préjudice des dispositions mentionnées à l'article L. 3212-7, il est mis fin à la mesure d'hospitalisation prise en application de l'article L. 3212-1 ou de l'article L. 3212-3 dès qu'un psychiatre de l'établissement certifie que les conditions de l'hospitalisation sur demande d'un tiers ne sont plus réunies et en fait mention sur le registre prévu à l'article L. 3212-11. Ce certificat circonstancié doit mentionner l'évolution ou la disparition des troubles ayant justifié l'hospitalisation.

    Dans les vingt-quatre heures qui suivent la fin de cette mesure d'hospitalisation, le directeur de l'établissement en informe le représentant de l'Etat dans le département, la commission mentionnée à l'article L. 3222-5, les procureurs de la République mentionnés à l'article L. 3212-5 et la personne qui a demandé l'hospitalisation.

    Le représentant de l'Etat dans le département peut ordonner la levée immédiate d'une hospitalisation à la demande d'un tiers dans les établissements mentionnés à l'article L. 3222-1 lorsque les conditions de l'hospitalisation ne sont plus réunies.

    Art. L. 3212-9. - Une personne hospitalisée à la demande d'un tiers dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 cesse également d'y être retenue dès que la levée de l'hospitalisation est requise par :

    1° Le curateur nommé en application de l'article L. 3211-9 ;

    2° Le conjoint ou la personne justifiant qu'elle vit en concubinage avec le malade ;

    3° S'il n'y a pas de conjoint, les ascendants ;

    4° S'il n'y a pas d'ascendants, les descendants majeurs ;

    5° La personne qui a signé la demande d'admission, à moins qu'un parent, jusqu'au sixième degré inclus, n'ait déclaré s'opposer à ce qu'elle use de cette faculté sans l'assentiment du conseil de famille ;

    6° Une personne autorisée à cette fin par le conseil de famille ;

    7° La commission mentionnée à l'article L. 3222-5.

    S'il résulte d'une opposition notifiée au chef de l'établissement par un ayant droit qu'il y a dissentiment soit entre les ascendants, soit entre les descendants, le conseil de famille se prononce dans un délai d'un mois.

    Néanmoins, si le médecin de l'établissement est d'avis que l'état du malade pourrait compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes, sans préjudice des dispositions des articles L. 3213-1 et L. 3213-6, il en est donné préalablement et aussitôt connaissance au représentant de l'Etat dans le département, qui peut ordonner immédiatement un sursis provisoire et, le cas échéant, une hospitalisation d'office conformément aux dispositions de l'article L. 3213-1. Ce sursis provisoire cesse de plein droit à l'expiration de la quinzaine si le représentant de l'Etat dans le département n'a pas, dans ce délai, prononcé une hospitalisation d'office.

    Art. L. 3212-10. - Dans les vingt-quatre heures suivant la sortie, le directeur de l'établissement en avise le représentant de l'Etat dans le département ainsi que la commission mentionnée à l'article L. 3222-5 et les procureurs mentionnés à l'article L. 3212-5 et leur fait connaître le nom et l'adresse des personnes ou de l'organisme mentionnés à l'article L. 3212-9.

    Art. L. 3212-11. - Dans chaque établissement est tenu un registre sur lequel sont transcrits dans les vingt-quatre heures :

    1° Les nom, prénoms, profession, âge et domicile des personnes hospitalisées ;

    2° La date de l'hospitalisation ;

    3° Les nom, prénoms, profession et domicile de la personne ayant demandé l'hospitalisation ;

    4° Les certificats médicaux joints à la demande d'admission ;

    5° Le cas échéant, la mention de la décision de mise sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice ;

    6° Les certificats que le directeur de l'établissement doit adresser aux autorités administratives en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3212-8 ;

    7° Les dates, durées et modalités des sorties d'essai prévues à l'article L. 3211-11 ;

    8° Les levées d'hospitalisation ;

    9° Les décès.

    Ce registre est soumis aux personnes qui, en application des articles L. 3222-4 et L. 3223-1 visitent l'établissement ; ces dernières apposent, à l'issue de la visite, leur visa, leur signature et s'il y a lieu, leurs observations.

    Art. L. 3212-12. - Les modalités d'application du présent chapitre sont déterminées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat.

    Chapitre III

    Hospitalisation d'office

    Art. L. 3213-1. - A Paris, le préfet de police et, dans les départements, les représentants de l'Etat prononcent par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'hospitalisation d'office dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 des personnes dont les troubles mentaux compromettent l'ordre public ou la sûreté des personnes. Le certificat médical circonstancié ne peut émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement accueillant le malade. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation nécessaire.

    Dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil transmet au représentant de l'Etat dans le département et à la commission mentionnée à l'article L. 3222-5 un certificat médical établi par un psychiatre de l'établissement.

    Ces arrêtés ainsi que ceux qui sont pris en application des articles L. 3213-2, L. 3213-4 à L. 3213-7 et les sorties effectuées en application de l'article L. 3211-11 sont inscrits sur un registre semblable à celui qui est prescrit par l'article L. 3212-11, dont toutes les dispositions sont applicables aux personnes hospitalisées d'office.

    Art. L. 3213-2. - En cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou, à défaut, par la notoriété publique, le maire et, à Paris, les commissaires de police arrêtent, à l'égard des personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes, toutes les mesures provisoires nécessaires, à charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au représentant de l'Etat dans le département qui statue sans délai et prononce, s'il y a lieu, un arrêté d'hospitalisation d'office dans les formes prévues à l'article L. 3213-1. Faute de décision du représentant de l'Etat, ces mesures provisoires sont caduques au terme d'une durée de quarante-huit heures.

    Art. L. 3213-3. - Dans les quinze jours, puis un mois après l'hospitalisation et ensuite au moins tous les mois, le malade est examiné par un psychiatre de l'établissement qui établit un certificat médical circonstancié confirmant ou infirmant, s'il y a lieu, les observations contenues dans le précédent certificat et précisant notamment les caractéristiques de l'évolution ou la disparition des troubles justifiant l'hospitalisation. Chaque certificat est transmis au représentant de l'Etat dans le département et à la commission mentionnée à l'article L. 3222-5 par le directeur de l'établissement.

    Art. L. 3213-4. - Dans les trois jours précédant l'expiration du premier mois d'hospitalisation, le représentant de l'Etat dans le département peut prononcer, après avis motivé d'un psychiatre, le maintien de l'hospitalisation d'office pour une nouvelle durée de trois mois. Au-delà de cette durée, l'hospitalisation peut être maintenue par le représentant de l'Etat dans le département pour des périodes de six mois maximum renouvelables selon les mêmes modalités.

    Faute de décision du représentant de l'Etat à l'issue de chacun des délais prévus à l'alinéa précédent, la mainlevée de l'hospitalisation est acquise.

    Sans préjudice des dispositions qui précèdent, le représentant de l'Etat dans le département peut à tout moment mettre fin à l'hospitalisation après avis d'un psychiatre ou sur proposition de la commission mentionnée à l'article L. 3222-5.

    Art. L. 3213-5. - Si un psychiatre déclare sur un certificat médical ou sur le registre tenu en exécution des articles L. 3212-11 et L. 3213-1 que la sortie peut être ordonnée, le directeur de l'établissement est tenu d'en référer dans les vingt-quatre heures au représentant de l'Etat dans le département qui statue sans délai.

    Art. L. 3213-6. - A l'égard des personnes relevant d'une hospitalisation sur demande d'un tiers, et dans le cas où leur état mental pourrait compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes, le représentant de l'Etat dans le département peut prendre un arrêté provisoire d'hospitalisation d'office. A défaut de confirmation, cette mesure est caduque au terme d'une durée de quinze jours.

    Art. L. 3213-7. - Lorsque les autorités judiciaires estiment que l'état mental d'une personne qui a bénéficié d'un non-lieu, d'une décision de relaxe ou d'un acquittement en application des dispositions de l'article 122-1 du code pénal pourrait compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes, elles avisent immédiatement le représentant de l'Etat dans le département, qui prend sans délai toute mesure utile, ainsi que la commission mentionnée à l'article L. 3222-5. L'avis médical mentionné à l'article L. 3213-1 doit porter sur l'état actuel du malade.

    Art. L. 3213-8. - Il ne peut être mis fin aux hospitalisations d'office intervenues en application de l'article L. 3213-7 que sur les décisions conformes de deux psychiatres n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le représentant de l'Etat dans le département sur une liste établie par le procureur de la République, après avis de la direction des affaires sanitaires et sociales du département dans lequel est situé l'établissement.

    Ces deux décisions résultant de deux examens séparés et concordants doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui.

    Art. L. 3213-9. - Le représentant de l'Etat dans le département avise dans les vingt-quatre heures le procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé l'établissement, le maire du domicile et la famille de la personne hospitalisée, de toute hospitalisation d'office, de tout renouvellement et de toute sortie.

    Art. L. 3213-10. - Les modalités d'application du présent chapitre sont déterminées en tant que de besoin par décret en Conseil d'Etat.

    Chapitre IV

    Dispositions pénales

    Art. L. 3214-1. - Le fait pour le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 de retenir une personne hospitalisée sans son consentement alors que sa sortie est ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département, en application du dernier alinéa de l'article L. 3212-8 ou de l'article L. 3213-5, ou par le président du tribunal de grande instance, conformément à l'article L. 3211-12, ou lors de la levée de l'hospitalisation en application des articles L. 3212-7, L. 3212-8, L. 3212-9 ou L. 3213-4 est puni de deux ans d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende.

    Art. L. 3214-2. - Est puni d'un an d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende, le fait pour le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 :

    1° D'admettre une personne sur demande d'un tiers sans avoir obtenu la remise de la demande d'admission et des certificats prévus aux articles L. 3212-1 et L. 3212-3 ;

    2° D'omettre d'adresser au représentant de l'Etat dans le département dans les délais prescrits les certificats médicaux et le bulletin d'entrée établis en application du deuxième alinéa de l'article L. 3212-4 ;

    3° D'omettre d'adresser au représentant de l'Etat dans le département dans les délais prescrits les certificats médicaux établis en application des articles L. 3212-7, L. 3213-3 et L. 3213-5 ;

    4° D'omettre de se conformer dans le délai indiqué aux prescriptions des articles L. 3212-11 et L. 3213-1 ;

    5° D'omettre d'aviser dans le délai prescrit les autorités mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 3212-8 de la déclaration prévue par ledit article ;

    6° D'omettre d'aviser le représentant de l'Etat dans le département dans les délais prescrits de la levée de l'hospitalisation sur demande d'un tiers prévue par l'article L. 3212-10 ou de la déclaration prévue par l'article L. 3213-5 ;

    7° De supprimer ou de retenir une requête ou réclamation adressée par une personne hospitalisée sans son consentement à l'autorité judiciaire ou à l'autorité administrative.

    Art. L. 3214-3. - Le fait, pour le directeur d'un établissement autre que ceux mentionnés à l'article L. 3222-1, de ne pas prendre dans le délai prescrit, les mesures nécessaires à la mise en oeuvre de l'une des procédures prévues par les articles L. 3212-1, L. 3212-3, L. 3213-1 ou L. 3213-2 dans les cas définis à l'article L. 3222-2 est puni d'un an d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende.

    Art. L. 3214-4. - Est puni d'un an d'emprisonnement et de 25 000 F d'amende, le fait pour le médecin d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 :

    1° De supprimer ou de retenir une requête ou une réclamation adressée par une personne hospitalisée sans son consentement à l'autorité judiciaire ou à l'autorité administrative ;

    2° De refuser ou d'omettre d'établir dans les délais prescrits les certificats médicaux relevant de sa responsabilité en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7, L. 3213-1 et L. 3213-3.


    Dernière mise à jour : dimanche 29 octobre 2000 19:36:11

    Monique Thurin