Le traitement et le suivi


1. LE TRAITEMENT MÉDICAL

Dans les suites d’une agression sexuelle, le médecin peut prescrire un traitement.

Le traitement a un but curatif mais aussi et surtout préventif.


TRAITEMENT CURATIF

Ce traitement peut être curatif en cas de lésions anatomiques (désinfections de plaies, sutures).

Il ne faut pas hésiter à recourir aux antalgiques, ceux de 1er niveau sont habituellement suffisants.

Les savons locaux spécifiques à visée antiseptique, aux propriétés adoucissantes et calmantes peuvent être prescrits.

Un traitement anxiolytique d’action brève, en cure courte pourra être utile les premiers jours.

En cas d’intoxication, le traitement médical symptomatique sera adapté à l’état de la victime.

Et de même, en cas de maladies sexuellement transmissibles, un traitement adapté sera prescrit.


TRAITEMENT PROPHYLACTIQUE

Le traitement reste essentiellement prophylactique et adapté aux circonstances de l’agression.

1 Prévention du Tétanos

En cas de plaies souillées de terre ou de débris végétaux et si la victime n’est pas correctement vaccinée, on réalise une sérovaccination antitétanique.

2 Prévention d’une grossesse

En cas de rapport vaginal, mais aussi anal ou vulvaire (migration possible des spermatozoïdes) chez une adolescente ou une femme en période d’activité génitale, sans contraception efficace, il convient de prévenir la survenue d’une éventuelle grossesse.

On fait préciser la date des dernières règles, le délai écoulé depuis l’agression.

En cas de délai de moins de 72 heures, il faut prescrire une contraception d’urgence (pilule du lendemain) :

° soit oestroprogestative : Tétragynon® (2 comprimés à renouveler 12 heures après). Contre indiqué en cas d’antécédents thromboemboliques.
Prévenir la patiente de possibles nausées ou vomissements fréquents.

° soit progestative pure : Norlevo® (1 comprimé à renouveler 12 à 24 heures après).

Ces deux méthodes sont rendues inefficaces en cas de traitement par anticonvulsivants, inducteurs enzymatiques, Ritonavir® (Norvir®).

Enfin, en cas de délai supérieur à 3 jours mais inférieur à 5 jours, la mise en place d’un stérilet est possible chez la femme adulte, multipare. En raison du contexte infectieux potentiel, une antibioprophylaxie est recommandée. La femme est orientée vers une consultation spécialisée de gynécologie pour la mise en place du dispositif intra-utérin.

3 Prévention des maladies sexuellement transmissibles (MST) bactériennes

En prévention des MST bactériennes, le traitement antibiotique vise principalement le Chlamydia Trachomatis mais aussi le gonocoque et la syphilis. Ce traitement est indiqué en cas de pénétration vaginale ou anale, mais aussi buccale.

Différents schémas thérapeutiques sont proposés :

Doxycycline cp à 100 mg : 2 comprimés par jour pendant 7 jours
Azithromycine cp à 250 mg : 4 comprimés en prise unique
Le traitement et le suivi
Le traitement par la doxycycline a pour avantage d’être constamment actif sur le Chlamydia Trachomatis, avec un coût limité. Par contre, sa durée de 7 jours peut en limiter l’efficacité en cas de mauvaise observance. Son efficacité sur le gonocoque est limitée par l’apparition récente de souches résistantes (actuellement 20 % en France).

Le traitement par l’azithromycine a un coût plus important ; cet aspect négatif est contrebalancé par l’observance parfaite d’une prise unique qui peut être contrôlée au cours de la consultation. Il est toujours efficace sur le Chlamydia. Le taux de résistance du gonocoque aux macrolides est actuellement estimé à 20-30 % en France.

Un échec du traitement sur le gonocoque par ces 2 molécules est possible.

Cependant, compte tenu de l’épidémiologie actuelle du gonocoque en France et de sa recherche systématique sur les prélèvements microbiologiques, il ne semble pas licite à ce jour de proposer un traitement prophylactique spécifique contre le gonocoque. Néanmoins, la recrudescence très récente du gonocoque dans certaines régions (Ile-de-France en particulier) peut le faire discuter de façon systématique dans ces régions en fonction de l’épidémiologie locale.

Bien entendu, la constatation de signes cliniques évocateurs (pharyngite, anite, écoulement muco-purulent) nécessite d’entreprendre un traitement spécifique en privilégiant les « traitement-minute » (ceftriaxone 250 mg en 1 injection IM, ofloxacine 400 mg per os en prise unique, par exemple...).

4 Prévention des MST virales

Pour les MST virales, la prophylaxie après exposition sexuelle est basée sur la Circulaire DGS/DH/DRT/DSS n° 98-228 du 9/04/98, relative aux recommandations de la mise en oeuvre d’un traitement antirétroviral après exposition aux risques de transmission du VIH.

La situation du viol est considérée comme à haut risque de contamination virale en raison des lésions muqueuses fréquentes.

Pour le VIH :

En cas d’agression sexuelle avec pénétration, quel que soit l’âge et le sexe de la victime, un avis est sollicité en urgence auprès du médecin référent des accidents d’exposition du Service des Urgences, du CDAG ou du Service référent pour le VIH, selon les modalités du dispositif d’accueil local, service accessible 24 h/24 (n° de téléphone CISIH en annexe).

L’évaluation du risque de contamination prend en compte les éléments suivants :

Circonstances de l’agression sexuelle :

Rapport sexuel anal réceptif avec agresseur VIH + : 0,5 - 3 % (risque majeur) Rapport sexuel vaginal réceptif avec agresseur VIH + : 0,05 - 0,15 %
Rapport sexuel oral réceptif avec agresseur VIH + : non déterminé, risque faible.

Facteurs aggravants :

L’agression : le viol est un facteur aggravant en soi, a fortiori en cas de saignements associés ou de défloration.
La connaissance éventuelle par la victime d’une MST ou d’une lésion génitale chez l’agresseur.

Délai écoulé entre la dernière agression et la consultation :

La circulaire recommande la mise en route du traitement dans les 48 heures. Le plus tôt possible est sans doute le plus efficace. Cependant, en pratique, dans ces circonstances d’agression sexuelle, le délai peut-être élargi à 72 heures ; la décision de traitement repose alors essentiellement sur la demande et l’inquiétude de la victime.

Connaissance du statut sérologique de l’agresseur :

à défaut, connaissance de ses conduites à risque ou de son appartenance à un groupe à risque.

Si un traitement antirétroviral est décidé, celui-ci doit être débuté en urgence dans l’établissement identifié pour la prise en charge des accidents d’exposition.

Un bilan sanguin pré-thérapeutique est réalisé (NFS, plaquettes, créatinine, bilan hépatique).

Le médecin référent pour la prise en charge du VIH réévalue la situation dans les 24-48 heures, puis assure le suivi du traitement prévu pour une durée de 1 mois (observance et tolérance).

Habituellement, une trithérapie est prescrite ; parfois seulement une bithérapie (risque faible, difficultés prévisibles d’observance, traitements associés...)

Pouvoir récupérer a posteriori le résultat des sérologies de l’agresseur - réalisées et transmises avec son accord - permet parfois de pouvoir alléger le traitement mis en place.

Si l’agresseur est connu comme séropositif pour le VIH, la connaissance du stade de l’infection, le degré de la charge virale et l’historique de son traitement permettent d’ajuster le traitement de la victime.

Il s’agit d’un traitement lourd car au traumatisme de l’agression subie s’ajoutent des effets indésirables fréquents et des contraintes importantes (horaires et règles de prise, fourniture en pharmacie hospitalière). Il requiert rigueur et régularité de la part de la victime à une période de sa vie où elle est déstabilisée.

Visant à prévenir une infection grave, ce qui devrait être un élément rassurant, ce traitement peut néanmoins être vécu comme inquiétant, ravivant à chaque prise le risque de contamination et le souvenir de l’agression. Les abandons sont fréquents surtout les premiers jours du traitement.

Ce traitement antirétroviral est délivré gratuitement par la pharmacie hospitalière car il s’intègre dans le cadre d’un accident d’exposition aux risques de transmission du VIH.

Pour l’Hépatite B :

En cas d’agression de moins de 8 jours, en l’absence de vaccination ou en cas de vaccination douteuse ou incomplète : faire une injection de vaccin contre l’hépatite B.

La poursuite ou non de la vaccination sera discutée selon le résultat de la sérologie initiale (antigène HbS, anticorps anti HbC, anticorps anti HbS).

En cas de vaccination antérieure, on recommande tout de même une injection de rappel du vaccin, sauf s’il est possible de vérifier le carnet de santé ou de vaccination de la victime.

En effet, il est fréquent de constater une méconnaissance de l'état vaccinal de la victime surtout quand on l’interroge à ce sujet alors qu’elle est en état de choc suite à l’agression.
De fréquentes discordances entre le résultat de la sérologie et les dires de la victime sont constatées. C’est pour cette raison que nous recommandons une injection de vaccin systématique.

En cas de circonstances particulières chez une victime non vaccinée, le médecin référent sollicité pourra discuter une éventuelle injection de gammaglobulines spécifiques VHB.

Pour l’Hépatite C :

Absence de traitement prophylactique.

2 L’ASSISTANCE PSYCHOLOGIQUE IMMÉDIATE

LE PREMIER CONTACT

Le premier entretien est essentiel. Il sera souvent déterminant pour le suivi ultérieur.
La diversité des situations rencontrées est grande :

° âge de la victime : enfant, adolescent, homme ou femme adulte.

° type d’agression : viol unique ou abus sexuels longtemps perpétrés.

° temps écoulé depuis l’agression qui peut être récente et donner lieu à des signes de souffrance psychologique aiguë ; mais qui le plus souvent est ancienne, longtemps passée sous silence, et qui, dès sa révélation, est accompagnée d’une symptomatologie traumatique constituée.

° personnalité de l’agresseur, qui peut être totalement inconnu de la victime, mais qui souvent se trouve être un proche, voire un membre de la famille.

La conduite à tenir ne peut donc être codifiée de façon stéréotypée. Elle devra chaque fois s’adapter au contexte. Certaines lignes directrices communes à toutes les situations doivent cependant être respectées :

° il importe de bannir toute attitude et tout propos qui risquent de majorer, voire de renouveler le traumatisme. La victime se sent coupable de ce qui lui est arrivé, elle craint de ne pas être crue. Plus que la peur, c’est souvent cette culpabilité paradoxale qui vient cadenasser les secrets et qui entraîne le silence ou la rétractation.
Ces aspects sont encore majorés lorsque la révélation risque de bouleverser l’équilibre familial.

° au-delà de son sens clinique, le médecin doit donc faire appel à toutes ses capacités d’empathie, de délicatesse et d’humanisme pour permettre à la victime d’aller au bout de son récit, sans jamais lui renvoyer une impression de méfiance, d’incrédulité ou de jugement de valeur.

° le médecin n’a pas à jouer un rôle d’enquêteur. Il ne lui appartient pas d’établir l'exactitude des faits. On ne lui demande pas de confondre les agresseurs.
Son rôle est de prodiguer les premiers soins et de faire un premier constat clinique qui pourra se matérialiser par un certificat médical.

° il faudra accepter que le récit reste flou, elliptique, brouillé par l’émotion. Il est important que la victime puisse décrire avec ses propres mots ce qu’elle a subi, ce qu’elle a ressenti : sa peur, sa détresse, son humiliation... Il convient de l’écouter avec attention et avec patience. Il sera nécessaire de la soutenir dans les évocations pénibles. C’est à chacun, dans sa pratique, de trouver les mots qui marquent la solli citude, de formuler les questions qui permettent un appui, sans jamais se réapproprier la souffrance de la victime.

° En pratique, on peut alterner des questions fermées et des questions ouvertes. Les premières ne donnent lieu qu’à des réponses courtes, mais elles sont souvent plus rassurantes en début d’entretien. Il faut veiller cependant à ne pas induire la réponse dans ce type de questions. Les questions plus ouvertes qui permettent un discours plus spontané, plus personnalisé, ne peuvent intervenir que lorsqu’un bon contact est établi. Leur utilisation abusive peut induire de l’inhibition et du silence.

° En aucune façon, l’entretien ne peut se réduire à un feu roulant de questions destinées à renseigner une grille d’examen.

Le traitement et le suivi


CE QU’IL NE FAUT PAS DIRE...

- Vous n’aviez jamais pensé que vous pouviez vous faire violer ?

- Ça vous est arrivé quand, ce problème ?

- Ce qu’il faut, avant tout, c’est vous déculpabiliser.

- Ce n’est pas aussi grave que vous le dites.

- Maintenant, il va falloir essayer d’oublier.

- Vous êtes sûr que vous ne pouviez pas vous défendre ?

- Sachez bien que je vous comprends.

Dès ce premier entretien, les perspectives de soins doivent être constamment présentes à l’esprit du praticien : verbaliser un vécu douloureux, nommer des affects, mettre des mots sur la souffrance, c’est permettre parfois l’abréaction positive d’un secret troplongtemps gardé ou l’expulsion nécessaire d’un trop plein d’affects.

Au-delà, il faudra toujours resituer la victime comme sujet et ne pas l’enfermer dans un statut de victime, objet d’une agression. L’évocation de son mode de vie habituel peut y contribuer, de même que la rencontre avec les proches ou les parents qui l’accompagnent. De quel entourage social, familial, affectif dispose-t-elle ? Sur qui peut-elle s’appuyer dans les jours qui viennent ? Est-il nécessaire de prévoir une hospitalisation ou un séjour en foyer ?

LA CLINIQUE

La présentation clinique de la victime sera très variable, selon le contexte, mais aussi selon son propre mode de réaction à l’agression. Schématiquement, nous décrirons deux types de situations cliniques : celle d’une victime d’agression sexuelle unique et récente puis celle d’abus répétés qui évoluent ou qui ont évolué sur une plus longuedurée.

1 Une agression récente peut déterminer un tableau aigu de détresse psychique.

Différentes composantes peuvent se rencontrer, parfois l’une prédomine, parfois elles se succèdent rapidement dans le temps :

° la stupeur : la victime est prostrée, quasi mutique, comme sidérée par ce qui vient de lui arriver. Le contact est difficile à établir ; elle intègre difficilement ce qui lui est dit.

° l’angoisse, faite d’une peur persistante, d’un désarroi intense. La tension anxieuse est extrême. Le visage est blême, défait. L’élocution est hachée, précipitée. Les gestes sont maladroits, parfois gênés par des tremblements incoercibles.

° l’agitation désordonnée. Elle peut s’accompagner de bouffées d’agressivité que la victime ne parvient pas à réfréner. Elle crie sa douleur et sa honte, son dégoût d’elle-même et de l’autre.

° la composante dépressive est constante. Même lorsque la victime donne l’image d’une apparente maîtrise de soi, ou bien qu’elle semble absente de ce qui lui est arrivé, le sentiment de désespoir est profond. Des sanglots ponctuent son discours et parfois le submergent totalement.

On retiendra qu’il n’existe pas de parallélisme entre la gravité de l’agression et l’expressivité du tableau clinique. De même, la sévérité ou au contraire la discrétion du tableau initial n’a pas de valeur prédictive pour l’évolution ultérieure.

Rencontrer les proches qui accompagnent la victime est un temps indispensable.

Cette rencontre se déroule en présence de la victime, mais ne peut tenir lieu à elle seule d’entretien.

Le cadre confidentiel d’un entretien duel doit toujours être recherché. Il sera proposé à la victime quel que soit son âge

Ce cadre est indispensable, dès lors qu’une situation d’abus sexuel intra-familial est suspectée.
Le traitement et le suivi

2 La révélation différée d’une longue période d’abus sexuels donne lieu à un tableau clinique différent.

a) Certains signes expriment la forte composante dépressive. Ils sont assez constants mais peu spécifiques. Ils traduisent de forts sentiments de dévalorisation de soi. La victime se sent coupable de ce qui lui est arrivé, coupable de ne pas s’être suffisamment défendue, coupable de s’être laissé faire, coupable de ne pas avoir parlé... Cette symptomatologie dépressive revêt différents aspects selon l’âge de la victime :

° les troubles du sommeil sont constants. Ils sont souvent accompagnés de cauchemars.

° chez l’enfant, les signes non spécifiques ont déjà été exposés dans le chapitre précédent.
Parmi eux, l’apparition d’une énurésie secondaire est un signe fréquent.

° les capacités de concentration intellectuelle sont parasitées par des ruminations incessantes. La fatigabilité est extrême. Chez l’enfant et l’adolescent, la chute du rendement scolaire est significative. Chez l’adulte, c’est sa capacité à entreprendre qui est atteinte.

° les troubles affectifs peuvent être très contrastés : désordre émotionnel, colère, crises de larmes, irritabilité ou, au contraire, repli sur soi, perte des investissements habituels, passivité extrême.

° un cortège de turbulences comportementales est aussi fréquent chez l’adolescent : fugue, école buissonnière, troubles alimentaires ou conduites addictives (alcool, drogue), désinvestissement de son propre corps qui peut aller de la simple négligence jusqu’aux automutilations.

° les tentatives de suicide sont souvent des signes d’appel. Parfois, l’enfant peut mimer ce type de passage à l’acte.

b) Les symptômes de répétition sont spécifiques de l’agression :

° cauchemars, rêveries éveillées au cours desquelles la victime revit avec une fascination horrifiée les scènes de viols.

° défilés d’images ou de séquences qui reproduisent à l’infini certaines scènes traumatiques, toujours les mêmes. La victime évoque des flashs ou des images qui tournent en boucle dans sa tête et qui induisent les mêmes bouleversements émotionnels que lors du traumatisme initial.

° phobie des situations où la victime se trouve en situation duelle avec toute personne qui lui rappelle l’agresseur.

° phobie des lieux ou des circonstances dans lesquels survenaient les abus sexuels.

° ces troubles phobiques peuvent parfois s’exacerber en de véritables états de panique.

c) Beaucoup plus spécifique encore, apparaît le retentissement sur la vie sexuelle de la victime, dont l’élaboration est gravement perturbée :

° chez l’enfant très jeune, des attitudes sexuelles très crues, vis-à-vis de ses camarades ou sur son propre corps, doivent alerter.

° l’adolescente décrit des blocages. Tout rapprochement sexuel lui est impossible.
Même au sein d’une relation sentimentale très investie, les gestes amoureux réactivent le traumatisme. Le visage de son agresseur se superpose à celui de son partenaire.

° le dégoût de la sexualité peut également amener des comportements en apparence paradoxaux : multiplications des relations sexuelles éphémères, conduites à risque, attitudes provocantes.

LES SOINS EN URGENCE

Leurs indications doivent être pesées.

1 Les médicaments psychotropes

Ils n’ont qu’un rôle adjuvant, mais l’aide qu’ils peuvent apporter ne doit pas être négligée. Il importe de ne pas laisser se développer de graves troubles du sommeil, théâtre de symptômes de reviviscence. La prescription d’un hypnotique peut être nécessaire.

De même, les paroxysmes anxieux, les tensions insupportables, les bouffées d’agressivité bénéficieront d’un traitement sédatif (le plus souvent, des benzodiazépines). Ces prescriptions devront être limitées dans le temps et leurs effets expliqués aux patients.

L’absence de prescription par le médecin ouvre souvent la porte à l’automédication.

Deux écueils devront être évités :

- Celui de suivi psychothérapique systématique pour toutes les victimes : décision hâtive souvent mal préparée qui ne laisse pas à la victime le temps d’élaborer sa demande et qui maintient le thérapeute dans le groupe indifférencié des enquêteurs / juges / experts / assistantes sociales.

- L’autre écueil est inverse : refuser toute approche psychothérapique au motif qu’il faut que la victime puisse oublier le traumatisme. C’est souvent l’opiniondes familles.

Cette illusion de l’oubli, comme à l’inverse, un trop plein de discours, conduit la victime à se refermer sur elle-même, verrouillant ses blessures secrètes un instant dévoilées par la révélation des faits.
Le traitement et le suivi

2 L’hospitalisation

Lorsque la victime est un enfant, l’hospitalisation dans un service de pédiatrie est souvent la meilleure réponse. Elle permet à la fois de compléter les bilans somatiques et d’initier les soins psychologiques. Elle peut aider l’enfant et ses parents lorsque ceux-ci sont trop bouleversés par l’agression. Lorsqu’il s’agit d’un enfant victime d’abus sexuels intra-familiaux, l’hospitalisation sera quasi systématique.

Lorsque la victime est un adulte ou un grand adolescent, l’hospitalisation sera proposée chaque fois que l’agression s’est accompagnée de blessures physiques ou qu’elle est à l’origine d’un état de détresse psychologique aiguë. Il en sera de même lorsque la victime est isolée sur le plan relationnel ou du fait du dévoilement.

3 Le soutien psychologique

L’essentiel, lors du premier contact, est d’éviter le repli de la victime sur elle-même avec l’instauration ou l’aggravation d’une symptomatologie traumatique enkystée.
Quelques rencontres courtes mais répétées sont nécessaires pour suivre l’évolution immédiate.

Dans la majorité des cas, le médecin qui a rencontré en premier la victime, peut continuer l’accompagnement les premiers temps quelle que soit sa spécialité. Son action est bien engagée puisqu’il a été l’interlocuteur privilégié après l’expérience mortifère et que ses constatations ont permis un possible recours à la loi.

3 LE SUIVI MÉDICAL ULTÉRIEUR

OBJECTIFS DE LA CONSULTATION MÉDICALE DE CONTRLE

Dans les suites d’une agression sexuelle récente avec pénétration, il est indispensable de proposer une consultation médicale de contrôle, un mois environ après les faits.

En cas de lésions physiques importantes, la victime peut être revue plus rapidement.

La victime peut être suivie par le médecin consulté lors de l'agression ou tout autre médecin de son choix. Elle est prévenue de la possibilité d’être contactée en cas d’anomalie constatée sur le bilan initial.

Dans les situations d’agression plus ancienne ou sans pénétration, le bien fondé d’une consultation à distance est évalué et discuté au cas par cas avec la victime.

Il convient d'identifier un médecin référent pour organiser le suivi médical ultérieur.

Dans la période qui suit l’agression, la victime est souvent désemparée avec perte de ses repères habituels. Il peut lui être difficile de faire la démarche d’une prise de rendezvous.

Il est dès lors important que la victime sache par avance à quel médecin référent elle pourra faire appel en cas de problème.

Il semble également souhaitable d’organiser le rendez-vous de la consultation de contrôle dès la consultation initiale, voire dans certains cas de le lui rappeler quelques jours avant la date du rendez-vous.

Ces précautions donnent à la victime la possibilité de pouvoir se projeter à nouveau dans le temps.

Malgré cela, il est fréquent que la victime ne se présente pas à la consultation de contrôle. Il est là aussi souhaitable de lui proposer un nouveau rendez-vous.

Cette consultation médicale comprend plusieurs objectifs.

ÉVALUER L'ÉTAT DE SANTÉ GÉNÉRAL

Lors de l’entretien de début de consultation, le praticien s’enquiert de l’état psychique :

° humeur, troubles du sommeil ou de l’appétit....

° recours à des médicaments ou toxiques

° recours à un psychiatre ou psychologue depuis l’agression.
(cf chapitre suivi psychologique ultérieur)

Si aucune prise en charge psychologique n’a été mise en place depuis l’agression, cet entretien peut être l’occasion d’orienter le patient vers une consultation spécialisée ou vers une association de soutien aux victimes.

VÉRIFIER L’OBSERVANCE DES TRAITEMENTS PRESCRITS EN URGENCE

Traitement antirétroviral : durée et quantité réellement prise, effets secondaires
Antibiothérapie
Vaccination contre l’hépatite B : à poursuivre en cas de vaccination débutée lors de la consultation initiale.

CONTROLER LA GUÉRISON DES LÉSIONS INITIALES

Les lésions génito-anales initiales sont habituellement cicatrisées.

En cas de fellation, on vérifie la normalité de l’examen du rachis cervical et de la bouche (gorge et ouverture de la machoire).

En cas de lésions corporelles associées lors de l’agression, on vérifie au cours de l’examen la guérison de toutes les lésions. Si besoin, on oriente vers le spécialiste correspondant.

DÉPISTER UNE GROSSESSE DÉBUTANTE

Chez la femme en période d’activité génitale, on vérifie la survenue des règles depuis l’agression (allure et date de survenue normales) ainsi que la poursuite de la contraception habituelle éventuelle.

Au moindre doute, voire de façon quasi systématique, on fait pratiquer un dosage des béta-HCG.

DÉPISTER DES MST CONSÉCUTIVES À L’AGRESSION

L’interrogatoire porte sur l’apparition de symptômes anormaux au niveau de la gorge, de l’anus ou de la sphère uro-génitale (brûlures, douleurs, écoulements, ulcérations...).

On recherche également les symptômes évocateurs de primo-infection par le VIH (fièvre, asthénie, adénopathies, rash cutané...).

L’examen clinique est ciblé sur le site de l’agression. Il recherche des signes d’infection.

Des prélèvements sont réalisés en fonction du site de l’agression et de la symptomatologie :
°
gorge : standard, gonocoque, chlamydia trachomatis (gargarisme), +/- herpès

° col utérin : standard, gonocoque, chlamydia, +/- herpès

° vagin : +/- trichomonas

° vulve : +/- herpès

° urètre : standard, gonocoque, chlamydia

° urines : ECBU, chlamydia (par PCR)

° anus : gonocoque +/- herpès.

En cas de pénétration vaginale, en raison des conséquences gynécologiques potentielles et de la possible latence de ces MST, il paraît indispensable de réaliser au minimum les prélèvements suivants :
° examen standard et recherche de gonocoques au niveau du col utérin

° recherche de chlamydia au niveau cervical et urètral (par PCR sur les urines).

PRESCRIRE LE BILAN BIOLOGIQUE ET SÉROLOGIQUE DE SURVEILLANCE

Le bilan est adapté en fonction du délai écoulé entre l’agression et le bilan, des résultats du bilan initial et des traitements antiviraux suivis après l’agression.

Bilan à 1 mois après l’agression :

Sérologies VIH 1 et 2, avec éventuellement charge virale VIH 1 en cas de doute clinique.

En cas de traitement antirétroviral : contrôle de la sérologie VIH 1 et 2 un mois après l’arrêt du traitement, soit deux mois après l'agression si la victime a pris son traitement pendant un mois.

Ag HBs, Ac anti-HBc : inutile si Ac anti-HBs positif sur le bilan initial

Hépatite C

Transaminases

Chlamydia, Herpès : si les sérologies initiales sont négatives

Bilan à 3 mois après l’agression :

Sérologies VIH 1 et 2

En cas de traitement antirétroviral : contrôle de la sérologie VIH trois mois après l’arrêt du traitement, soit quatre mois après l'agression si la victime a pris le traitement pendant un mois.

HTLV

VDRL-TPHA

Ag HBs, Ac anti-HBc : inutile si Ac anti-HBs positif sur le bilan initial

Hépatite C

Transaminases

Bilan à 6 mois après l’agression :

Sérologies VIH 1 et 2

Hépatite C

Transaminases

RASSURER LA VICTIME

Lorsqu’elle fait suite à une agression récente, la consultation de contrôle est une étape privilégiée car elle réaborde les différents points cités ci-dessus.
Le traitement et le suivi
Conduite avec le même tact, elle se déroule dans un contexte moins dramatique que la consultation initiale.

Elle permet le plus souvent de rassurer la victime sur :

° la restauration de son intégrité anatomique : les lésions cicatricielles habituellement minimes, de l’ordre de quelques mm, doivent être explicitées, même à l’enfant.

° la normalité du bilan initial.

° l’absence de complication visible lors de la consultation.

De plus, on lui explique :

° les prélèvements de contrôle et la possibilité d’un traitement adapté en cas d’anomalie dépistée.

° la poursuite d’une surveillance sérologique prolongée qui reste généralement négative en raison de la rareté de ces affections.

° l’assurance d’être informée des résultats des examens à venir.

Enfin, on rassure la victime, surtout s’il s’agit d’un enfant, sur la poursuite de sa croissance, la survenue de sa puberté, une possible vie amoureuse ultérieure féconde...

S’il s’agit d’un enfant, on prendra également le soin de rencontrer ses parents pour les informer de l’absence de séquelles physiques et répondre à leurs questions.

Il est fréquent qu’à l’issue de la consultation, la victime se sente et se dise soulagée.

Le regard médical de protection, d’humanité, la mise en mots des sensations et des lésions corporelles, la délicatesse du geste, la préoccupation du devenir sont autant d’éléments que le médecin offre à la victime pour lui permettre la restauration de son corps altéré, éprouvé.

4 LE SUIVI PSYCHOLOGIQUE ULTÉRIEUR

FAUT-IL D’EMBLÉE FAIRE APPEL À UN SPÉCIALISTE ?

Le recours au spécialiste, psychiatre ou psychologue, ne sera jamais systématique.
Dans bon nombre de cas, le médecin qui a assuré le premier accueil peut poursuivre l’accompagnement quelle que soit sa spécialité. L’orientation rapide vers un psychiatre sera néanmoins nécessaire dans les cas les plus sévères :

° état de détresse manifeste avec prostration intense, agitation, agressivité anormale,

épisodes de panique apparus peu de temps après l’agression,

° symptômes de déréalisation ou de dépersonnalisation ; la victime a le sentiment d’avoir été spectateur de sa propre agression. Amnésie de l’agression.

° notion d’antécédents psychiatriques : dépression majeure, troubles de la personnalité, pathologie psychotique...

Chez l’enfant, la prise en charge psychologique est plus fréquemment indiquée en raison de nombreux facteurs de vulnérabilité qui se surajoutent au choc psychique de l’agression.

RISQUES ÉVOLUTIFS DES AGRESSIONS SEXUELLES INSUFFISAMMENT
PRISES EN CHARGE

Toute maltraitance sexuelle laisse des séquelles dans l’histoire du sujet. Celles-ci sont plus ou moins importantes en fonction d’innombrables facteurs individuels. Elles peuvent être majeures lorsque aucune prise en charge n’a pu être mise en place.

En l’absence de soins, l’aggravation, parfois après un temps de latence, se poursuit et se constitue un tableau clinique de névrose traumatique encore appelée état de stress post traumatique dans les classifications internationales récentes.

Ce tableau clinique est exactement celui que nous avons décrit lors d’une révélation différée d’agression sexuelle ancienne. Nous ne reprendrons pas sa description.

L’évolution défavorable, si elle se poursuit encore, est marquée par des aménagements voire une réorganisation complète de la personnalité de la victime dont les troubles retentissent sur son environnement social, familial et professionnel.

Parmi ces modifications de la personnalité, signalons :

° une diminution, voire une perte de l’élan vital,

° une quête permanente d’amour sans investissement affectif réel,

° le sentiment d’être incompris ou méconnu dans sa situation de victime,

° une perte d’espoir dans l’avenir,

° une irritabilité, une méfiance, voire des tendances quérulentes dans les relations avec autrui,

° plus rare, l’installation du sujet dans son statut de victime avec une recherche consciente ou inconsciente de bénéfices secondaires.

Ces troubles qui font suite au syndrome de répétition évoluent en l’absence de tout traitement précoce vers un enkystement, aboutissant à des personnalités fragiles, caractérielles, voire des états limites.

Certains auteurs ont souligné la fréquence, chez les agresseurs sexuels, d’allégations d’abus sexuels subis dans leur enfance. Cette fréquence, même si elle est réelle, ne doit pas donner lieu à des interprétations hâtives.

Chez l’enfant, la sévérité du tableau clinique est fréquente lorsque la révélation a été faite tardivement. Certains facteurs majorent la destructivité liée à l’abus sexuel :

° relation particulièrement forte entre l’auteur de l’agression et l’enfant. Il peut s’agir d’une relation de dominance ou de contrainte physique mais ce sont souvent les relations de séduction perverse qui sont les plus destructrices en raison de la culpabilité qu’elle entraîne chez la victime,

° fréquence et durée de la période de temps durant laquelle se sont perpétrés les abus sexuels,

° importance de la différence d’âge entre l’agresseur et l’enfant,

° indifférence ou incrédulité de l’environnement lorsque l’enfant a demandé de l’aide,

° absence de soutien affectif de la part de la famille ou des institutions.

Il est fréquent que les tentatives pour orienter la victime ne soient pas suivies d’effet.
Dans ce cas, il est indispensable que le médecin de famille continue à se préoccuper de l’évolution ultérieure.

LES ÉLÉMENTS DE PRISE EN CHARGE DES VICTIMES
D’AGRESSION SEXUELLE

Au cours de sa carrière, tout médecin est amené à accueillir des patients présentant l’un ou l’autre des tableaux cliniques que nous avons décrits, selon le délai passé entre le temps de l’agression et celui de l’examen.

Bien sûr, la prise en charge des pathologies traumatiques évoluant de longue date sera affaire de spécialistes surtout lorsque la symptomatologie apparaît fixée. Par contre, lors d’une agression récente, lorsque la symptomatologie immédiate s’est estompée après les premiers soins, l’évolution devra être longtemps surveillée par des entretiens réguliers espacés de loin en loin. Le médecin de famille est l’acteur privilégié pour ce suivi de l’évolution. Il sera souvent utile de proposer un calendrier de visites régulières.
Le médecin traitant est souvent le seul à proposer une relation constructive à la victime, coincée entre une famille qui peut être désemparée, peu étayante, et un appareil judiciaire complexe.

Là encore, plusieurs modalités évolutives peuvent se rencontrer.
Parfois, ce suivi sera suffisant et le tableau initial évoluera vers une certaine cicatrisation. L’agression n’est certes pas oubliée mais son souvenir cesse d’être invalidant, la symptomatologie traumatique s’estompe. Le praticien devra néanmoins être particulièrement attentif aux grandes étapes de la vie psychoaffective de la victime : adolescence, premières rencontres amoureuses, début de la vie d’adulte, naissance d'un enfant, mariage, séparation... Chacune de ces étapes peuvent se trouver perturbées par le traumatisme initial dont la symptomatologie spécifique se trouve réactivée.

Chez l’enfant, il convient d’avertir les parents de ces risques évolutifs.

Pour toutes les victimes, quel que soit leur âge, la résurgence d’une symptomatologie traumatique nécessitera des mesures de soins énergiques et l’orientation vers un suivi spécialisé : consultations d’un psychiatre ou d’un psychologue, suivi psychothérapique, etc.

Nous ne détaillerons pas les différentes techniques de soins qui peuvent être proposées. Le plus souvent, elles nécessitent le recours à un spécialiste. Les études récentes indiquent que l’efficacité optimale est obtenue par une approche multidisciplinaire, en associant des prises en charge psychothérapiques et une prescription de médicaments psychotropes.

CONCLUSIONS

Dans l’aide aux victimes d’agression sexuelle, le praticien de terrain (médecin de famille, généraliste...) occupe une place prépondérante :

° il est souvent celui qui assure l’assistance psychologique immédiate. Ses qualités d’écoute et d’empathie seront déterminantes pour le suivi ultérieur.

° lorsque l’accalmie symptomatique n’impose pas le recours immédiat à un spécialiste, il est celui qui doit surveiller l’évolution de la victime, en particulier au moment des grandes étapes de sa vie psychoaffective afin de déceler une éventuelle résurgence des symptômes traumatiques.

° il est enfin celui qui doit fermement orienter la victime vers un suivi spécialisé lorsque l’intensité de la symptomatologie traumatique est sévère et risque d’évoluer vers un tableau d’enkystement comportant de lourdes séquelles psychologiques.

5. LE SUIVI SOCIAL

Il s'agit des mesures de protection mises en oeuvre lorsque le mineur est victime de violences sexuelles intra-familiales ou lorsque la famille est dans l'incapacité ou dans la difficulté pour assurer l'accompagnement et la protection du mineur.

DISPOSITIF DE PROTECTION DE L'ENFANCE MALTRAITÉE

La protection de l'enfance est assurée par les autorités administratives et judiciaires.

1 La protection administrative

Elle est placée sous l'autorité du Président du Conseil Général. C'est le service de l'Aide Sociale à l'Enfance, ASE, qui est spécifiquement chargé de la prévention des mauvais traitements et de la protection des mineurs maltraités.

Trois services placés sous l'autorité du Président du Conseil Général participent à cette mission :

° l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE).

° la Protection Maternelle et Infantile (PMI).

° le Service Social Départemental.

Le signalement administratif est recommandé lorsqu'une situation de maltraitance est suspectée et qu'une évaluation complémentaire apparaît nécessaire pour mieux estimer la situation.

2 La protection judiciaire

La protection judiciaire de l'enfance en danger est assurée par les magistrats (procureur de la République, juge des enfants). Cette protection revêt essentiellement la forme de l'assistance éducative.

Le signalement judiciaire, au procureur de la République, s'impose dans les situations de danger immédiat et réel, notamment en cas d'abus sexuels avérés (voir modèle supra). Il a pour objectif de demander des mesures de protection à l'égard du mineur.

MESURES DE PROTECTION

Le placement est prévu à l'art. 375.3 du Code Civil : "s'il est nécessaire de retirer l'enfant de son milieu actuel, le juge peut décider de le confier :

1° A celui des père et mère qui n'avait pas l'exercice de l'autorité parentale ou chez lequel l'enfant n'avait pas sa résidence habituelle ;

2° A un autre membre de la famille ou à un tiers digne de confiance ;

3° A un service ou un établissement sanitaire ou d'éducation, ordinaire ou spécialisé ;

4° A un service départemental de l'aide sociale à l'enfance."

Si le praticien, qui a recueilli la parole de l'enfant et procédé aux examens médicaux évalue la pertinence d'une de ces solutions, il convient de l'indiquer au procureur de la République. En effet, l'intervention en urgence du magistrat ne lui permet pas de diligenter les enquêtes nécessaires, qui orienteraient son choix.

Si le placement de l'enfant n'est pas immédiatement nécessaire, le praticien peut cependant estimer qu'un suivi de l'enfant sur le plan social et éducatif est souhaitable.

Il convient donc de saisir le service de l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE), du Conseil Général, en exposant la situation et en précisant les raisons pour lesquelles un suivi particulier de l'enfant et de sa famille est nécessaire. Les raisons peuvent être aussi bien des difficultés financières, des difficultés éducatives, des mauvaises conditions de vie, une fragilité particulière des parents etc...

Le service de l'aide sociale à l'enfance pourra proposer à la famille des aides à domicile qui comprennent :

° des aides financières,

° l'intervention d'un travailleur familial,

° une assistance éducative en milieu ouvert,

° un hébergement mère - enfant pour les mères isolées avec un enfant de moins de trois ans.

Outre ces mesures spécifiques de l'Aide Sociale à l'Enfance, les services du Conseil général pourront assurer un suivi de la famille ainsi qu'un suivi particulier de la PMI.

La mise en oeuvre des mesures de l'Aide Sociale à l'Enfance n'est possible qu'avec la collaboration et l'accord de la famille, qui seront formalisées dans le cadre d'un contrat administratif entre les titulaires de l'autorité parentale et le service de l'ASE.

Il appartiendra au service de l'ASE, de saisir le procureur de la République, si cette négociation avec la famille n'aboutissait pas, pour que des mesures d'accompagnement éducatif soient mises en oeuvre.

Le juge des enfants pourra alors prononcer, après avoir éventuellement ordonné des investigations complémentaires, une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert (AEMO) ou un placement.

Lorsque la mesure d'accompagnement ou de placement est exécutée, il est nécessaire de prévoir une collaboration entre les services chargés du suivi médical du mineur (en particulier la prise en charge psychologique) et les services chargés de l'accueil et du suivi du mineur (ASE, services habilités).

En effet, la prise en charge d'un mineur victime d'abus sexuels, doit conjuguer la prise en charge thérapeutique et un accompagnement de qualité. La coordonation entre les services de soins et les services sociaux gérant l'accueil et le suivi de l'enfant et de sa famille est donc indispensable.


Dernière mise à jour : lundi 12 novembre 2001 18:29:32
Dr Jean-Michel Thurin